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MUKAI Kosuke, Les chats ne rient pas, Éditions Picquier.

Traduit du japonais par DARTOIS-AKO Myriam

13 x 20.5 cm

160 pages

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Il y a d’abord un chat de gouttière au pelage d’un roux doré, qui aime dormir pelotonné en U devant le poêle. Il est vieux et ses jours sont comptés. Pour réconforter ce chat en fin de vie, se forme un étrange ménage à trois composé d’une jeune et prometteuse réalisatrice de cinéma, de son mari journaliste et de son ex-compagnon, scénariste désenchanté et trop porté sur la boisson. Une intimité imprévue se crée entre eux à la faveur de leur amour commun pour ce chat. Car sa présence crée une mystérieuse alchimie avec ces sentiments mêlés qui agitent le cœur des hommes et leur sont parfois si impénétrables. Peut-être leur donne-t-il l’occasion de comprendre enfin, et de faire face bravement…

 

L’humanité – tout le monde le sait – se divise en deux camps opposés : les gens à bébés et les gens à chats. La personne qui vous écrit est résolument une personne à bébé – elle en possède même un modèle dernier cri (c’est le cas de le dire) de trois mois. Elle a donc abordé la lecture de Les chats ne rient pas de MUKAI Kosuke (Éditions Picquier, à paraître le 27 septembre) avec l’impression de céder gracieusement son temps à l’ennemi, prête à prêter le flanc à l’ennui – son flanc restant servant de petit trône à bébé.

« Un chat, ça apprend à ouvrir les portes, jamais à les refermer. »

Quelle erreur, quelle belle erreur. Scénariste, MUKAI Kosuke bâtit son premier roman en apportant à une charpente narrative solide une légèreté stylistique agréable comme un brise. Les images parlent clair et parlent profond.

Autour d’un futur deuil que nombreux qualifieraient de risible, celui d’un chat, un couple séparé depuis longtemps – elle remariée, lui en union stable avec la bouteille – se retrouve au chevet de l’animal affaibli afin de lui apporter les derniers soins et de le (et se) préparer à sa disparition. Le chat, qui a accompagné le couple de son idylle à sa chute, et sa amoureux inéluctable, offrent l’occasion à Hayakawa, le narrateur, de reparcourir un passé amoureux à moitié oublié et interroger un présent passionnel à moitié oubliable.

« À en juger par son profil, les souvenirs déferlent et s’éparpillent, impossibles à saisir comme à juguler, ne lui laissant d’autre choix que d’attendre qu’ils passent, ce qu’elle fait bravement. »

MUKAI a une très grande habileté pour creuser et décrire l’attachement entre humains et entre humains et animaux – ce dernier étant de fait identique au premier, il faut bien l’avouer. La faiblesse, le deuil – d’un chat, d’une personne, d’un amour -, les regrets sont livrés avec une très grande douceur et une empathie sincère.

 « Il faut accepter d’aimer. Nous qui avons du mal à nous aimer nous-mêmes, nous devons au moins essayer d’aimer quelqu’un d’autre sans avoir peur. »

Les chats ne rient pas est une lecture suffisamment légère et profonde pour nous accompagner en cette rentrée encore trouble, nous faire entrer dans la domesticité des autres – nous qui avons tous été enfermés dans la nôtre pendant plusieurs mois – et nous rappeler que notre cœur est encore capable de battre – pour un projet, un chat, une personne, un être.

(edg)