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Silent Voice, de Naoko Yamada
avec Mélanie Deaf, Miyu Irino, Saori Hayami, Aoi Yūki
En salles le 22 Août – Japon – 2h09

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Nishimiya est une élève douce et attentionnée. Chaque jour, pourtant, elle est harcelée par Ishida, car elle est sourde. Dénoncé pour son comportement, le garçon est à son tour mis à l’écart et renvoyé du lycée… Des années plus tard, il apprend la langue des signes… et part à la recherche de la jeune fille. Un chef d’œuvre de l’animation japonaise, d’une profondeur bouleversante et d’une infinie créativité visuelle. Le meilleur anime de 2018.

Que nous dit le silence ? Beaucoup de choses, à qui sait l’entendre… Car le silence n’est pas une langue amoureuxe. Il enveloppe même les sentiments de la plus belle matière qui soit, là où la parole peut refléter le mensonge, le non-dit. Pour cette raison, parler en langue des signes, c’est en quelque sorte se mettre à nu ; ne plus pouvoir se cacher derrière des intonations, des inflexions, des variations de ton. C’est donner une forme au silence, sculpter le sentiment avec la gestuelle de ses mains, mais aussi l’expression du visage et du corps. Pour se comprendre, il faut se regarder, apprivoiser l’autre, s’y consacrer… La jeune réalisatrice de Silent Voice sait de quoi elle parle : sa mère était muette, elle a grandi avec ce handicap.

Cette vérité de l’échange dans le silence, Ishida finira par la comprendre le jour où il retrouvera Nishimiya : sa manière d’entretenir le bruit autour de lui, de la persécuter en railleries lorsqu’ils étaient enfants, reflétait sa peur du vide — l’angoisse profonde de ne pas être à sa place. En revanche, obtenir l’assentiment d’un groupe, celui des élèves de sa classe, avait de quoi le rassurer… Même s’il fallait se montrer cruel pour l’obtenir. Silent Voice est une œuvre d’animation très émouvante qui marque et se démarque par la richesse de ses thématiques — atypiques, sensibles — que ce soit le handicap, le harcèlement ou plus globalement l’intégration dans la société. Avec une justesse précieuse où le silence est d’or, il décortique le processus qui amène un groupe à désigner ce qui le gêne. Mais aussi celui qui conduit à s’ouvrir petit à petit au monde, à y retrouver sa place. Les personnages, gorgés de contradictions et de sentiments entremêlés, ont une envergure que l’on retrouve rarement dans les « anime », ce qui nous conduit à suivre avec une tendresse décuplée leur complexe chemin de vie. Et finalement, dans cette coquetterie qu’a Nishimiya de relever ses cheveux, assumant socialement son appareil auditif, l’essentiel est à sa portée : Ishida a fait le pas de l’écouter, elle fera celui de s’accepter… OJ