Un film de Hiroshi Okuyama
Japon | 1h30 | Sortie le 25 décembre 2024
Sur l’île d’Hokkaido, l’hiver est la saison du hockey pour les garçons. Takuya, lui, est davantage subjugué par Sakura, tout juste arrivée de Tokyo, qui répète des enchaînements de patinage artistique. Il tente maladroitement de l’imiter si bien que le coach de Sakura, touché par ses efforts, décide de les entraîner en duo en vue d’une compétition prochaine… À mesure que l’hiver avance, une harmonie s’installe entre eux malgré leurs différences. Mais les premières neiges fondent et le printemps arrive, inéluctable.
Tout est dit dans ce titre en apparence simple mais dont on pourrait oublier la double nature : un soleil tantôt symbole de lumière, de joie et d’espoir, tantôt symbole de feu, de danger et de recommencement. « Regarde toujours dans la direction du soleil levant et tu ne verras jamais l’ombre derrière toi ». Il est question de cela dans My Sunshine, film en état de grâce qui a rafraîchi autant qu’il a ébloui les festivaliers à Cannes, qui lui ont accordé la plus longue standing ovation du Festival.
La plus grande énigme, pour le jeune Takuya, reste encore celle de la vie. Tapi dans l’ombre de son intériorité, immaculée comme les paysages enneigés d’Hokkaido, il peine à s’affirmer. Aussi fait-il du hockey comme tous les autres garçons, sans grande conviction, simplement pour suivre le mouvement et passer l’hiver sans s’ennuyer. C’est alors qu’arrive une fille de Tokyo. Sakura, « fleur de cerisier », sans doute annonciatrice d’un nouveau printemps. Takuya ne peut s’empêcher de l’épier, fasciné, lorsqu’elle pratique le patinage artistique dans la même patinoire que la sienne. L’adolescente est aussi gracieuse et déterminée que Takuya est hésitant et maladroit.
Alors que le soleil de l’hiver se fait irradiant à la surface de l’eau gelée, l’adolescent va sentir son cœur s’emballer, pour la première fois. Commence alors une série d’entraînements à l’abri des regards, où Takuya tente de reproduire tant bien que mal les mouvements virevoltants de Sakura. Touché par sa détermination autodidacte, le coach de cette dernière décide de l’entraîner, d’abord à titre individuel, puis en duo avec la jeune Tokyoïte. En tant qu’ancien champion du monde de patinage en duo ayant atteint des sommets, on devine combien est grand pour lui l’enjeu de la transmission.
Deux philosophies vont se croiser. Deux philosophies pour affronter la vie, qui se complètent aussi. Entre la jeune fille confiante de la capitale, un brin téméraire, et le garçon introverti de la campagne, il est une complicité que les mots seuls ne suffisent pas à définir. Celle de deux corps qui s’ouvrent, de deux êtres qui s’éloignent peu à peu de l’enfance pour mieux se rapprocher dans un voyage initiatique qui les entraîne dans des tourbillons de beauté, où toute candeur a disparu… Mais cette belle histoire de mentor à élève va se voir rattrapée par des préjugés sociaux, qu’on pourrait tout aussi bien qualifier d’enfantillages pour les adultes… Et où l’on découvre que Billy Elliott (Stephen Daldry, 2000) s’avère toujours autant d’actualité…
Sous forme de tableaux radieux, entre montagnes, neige et lacs, les gestes des protagonistes s’affinent et s’accordent joyeusement au changement de saison. Les scènes de patinage se font de plus en plus denses et cadencées, sortes d’évocation chorégraphique des relations qui se nouent. La parfaite symétrie des cadrages baignés par la lumière hivernale vient rehausser l’harmonie qui s’établit entre les trois protagonistes, dans une histoire qui n’appartient qu’à eux, avec cette touche d’espièglerie si chère à Wes Anderson. Encore plus qu’un feel-good movie, My Sunshine est comme une fugue, un pied-de-nez aux idées reçues, un hymne à la volonté au service des rêves et de la poésie.
O. J.
Crédits photos : Art House films
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