Notre sélection des films japonais incontournables
Le cinéma japonais contemporain mêle l’intime et le social avec une justesse rare. À travers la famille, le travail, la solitude ou la mémoire, il explore la manière dont on continue à vivre dans un monde en transformation. Derrière son apparente lenteur, il cache une énergie discrète : celle du soin, de la dignité, du regard juste.
Dix films essentiels pour comprendre le Japon d’aujourd’hui — et sa façon unique d’émouvoir sans élever la voix.

1. Nobody Knows – Hirokazu Kore-eda (2004)
Inspiré d’un fait divers, Nobody Knows suit quatre enfants abandonnés par leur mère dans un appartement de Tokyo. Kore-eda filme leur quotidien avec une douceur presque invisible : pas de drame accentué, mais la lumière, le silence, les petits gestes. Le film dit tout du Japon urbain et de ses angles morts : la solitude, la pudeur, la capacité d’inventer malgré l’abandon. Un chef-d’œuvre d’humanité discrète.

2. Departures – Yōjiro Takita (2008)
Oscar du meilleur film étranger, Departures raconte la reconversion d’un violoncelliste devenu employé funéraire. À travers lui, Takita filme la mort comme une cérémonie d’attention. Chaque geste, chaque silence devient prière. Sous son humour léger se cache une méditation sur la réconciliation : entre le corps et l’âme, entre les vivants et les morts, entre le Japon moderne et sa spiritualité ancienne.

3. Shokuzai – Kiyoshi Kurosawa (2012)
Mini-série devenue film, Shokuzai (Penance) suit plusieurs femmes hantées par un crime d’enfance non élucidé. Kurosawa transforme le drame policier en parabole morale : culpabilité, vengeance, pardon. Il y déploie une atmosphère étouffée, presque mystique, où la société japonaise apparaît comme un théâtre du remords. Un sommet de précision et d’ambiguïté.

4. Les Délices de Tokyo – Naomi Kawase (2015)
Sous la douceur de ses dorayaki – ces pâtisseries fourrées à la pâte de haricots rouges – se cache une grande leçon de vie. Kawase raconte la rencontre entre un vendeur taciturne et une vieille femme au passé secret. Le film respire la lenteur, la bienveillance, le goût du geste juste. Une fable sensorielle et lumineuse sur la rédemption et la transmission.

5. Senses – Ryūsuke Hamaguchi (2015)
Cinq femmes, cinq chapitres, un seul mouvement : celui de l’écoute. Hamaguchi filme la conversation comme une matière vivante, où la pensée se construit en temps réel. C’est un film sur la solitude féminine, l’amitié, la dignité silencieuse des émotions. Une œuvre essentielle, fondatrice du cinéma japonais contemporain.

6. La Famille Asada – Ryōta Nakano (2020)
Entre rire et tendresse, La Famille Asada retrace l’histoire vraie d’un photographe excentrique qui met en scène ses proches dans des clichés fantasques. Au fil des années et des drames, ces portraits deviennent une mémoire commune, un geste de résistance face à l’oubli. Nakano signe une comédie douce-amère sur la solidarité et le pouvoir réparateur de l’art. Un hommage à la famille japonaise, dans tout ce qu’elle a d’imparfait et d’indestructible.

7. A Man – Kei Ishikawa (2022)
Quand une femme découvre que son mari n’était peut-être pas celui qu’elle croyait, A Man se transforme en enquête intime sur l’identité et la mémoire. Ishikawa mêle le thriller et la réflexion métaphysique, observant un Japon où l’apparence tient lieu de vérité. Tout y est feutré, précis, bouleversant. Un grand film sur la culpabilité et la part d’ombre que chacun porte.

8. Love Life – Kōji Fukada (2022)
Fukada explore la faille entre amour et responsabilité. Après un drame accidentel, une jeune femme retrouve son ex-mari, sourd, et réapprend à aimer autrement. Love Life interroge la communication au-delà des mots : la gestuelle, la distance, la compassion. Un film d’une limpidité émotionnelle rare, où chaque silence devient aveu.

9. Perfect Days – Wim Wenders (2023)
Hirayama nettoie les toilettes publiques de Tokyo, écoute Lou Reed et photographie les arbres. Dans ce quotidien répété, Wenders trouve une forme de paix. Perfect Days observe la beauté du banal, l’harmonie entre travail, solitude et gratitude. Un film lent, lumineux, universel : un hommage à l’art de vivre japonais et à la beauté du présent.

10. Le Joueur de Go – Kazuya Shiraishi (2024)
Quatre enfants abandonnés dans un appartement de Tokyo : un drame sans cri ni musique. Kore-eda filme leur survie au rythme de leur respiration. Le temps s’étire, les visages grandissent, la vie continue. Tout passe par le geste et la lumière — un cinéma de compassion absolue, qui regarde la fragilité avec une douceur inouïe.
Ces dix films dessinent la carte du Japon contemporain : un pays à la fois lucide et tendre, traversé par le deuil, la mémoire et la reconstruction. Ils prouvent que la modernité japonaise ne se mesure pas à la vitesse, mais à la justesse du regard. Une décennie d’images et d’émotions qui rappellent que, dans le cinéma japonais, la beauté se cache toujours dans le détail.





