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Le guide ultime de l’anime : 100 séries et films d’animation incontournables

Un livre de Joe O’Connell
Les Éditions du Chêne
Traduit de l’anglais par Jean-Baptiste Bonaventure
304 pages

À la croisée des chemins entre la Bible et le Routard, Le guide ultime de l’anime (Éditions du Chêne) est (en plus d’un très très beau livre grand format) un outil fondamental, aussi bien pour les passionnés que pour les néophytes de l’animation. À travers 100 anime, films ou séries, savamment choisis, Joe O’Connell, l’homme derrière la chaîne YouTube Beyond Ghibli, retrace 50 ans d’animation qui ont changé le Japon… et le monde.

Le doux parfum de l’interdit

Il faut s’imaginer le décor : province italienne, années 1990. La personne qui vous écrit, du haut de ses 8 ans (à l’époque), découvre Sailor Moon. Mais Sailor Moon passe à 20h, l’heure du JT sur la première chaîne, l’heure du JT des parents. Pire, Sailor Moon passe à 20h sur une chaîne du groupe Mediaset, la télé berlusconienne. C’est non. Pareil pour les Chevaliers du Zodiaque. Pareil pour Lady Oscar, le dessin animé qui a fait plus, mieux et plus vite, pour des millions d’enfants italiens, que des centaines d’heures de cours d’histoire. Le dessin animé qui, par mèches de 23 minutes à la fois, a mis le feu aux passions de futurs historiens et comparatistes.

Pour moi et pour bien d’autres, avec ou sans JT et conflits d’intérêts politiques, l’anime sentait bon l’interdit. C’était quoi toute cette violence ? Ces jupes si courtes ? Ces jambes si longues ? Et ces langueurs, bon sang. Est-ce bien raisonnable à 5/6/7/8/9/10 ans ?

Construire un guide ultime

Le même goût de fruit défendu a alimenté l’appétit de Joe O’Connell, l’animateur de la chaîne YouTube à 170 000 abonnés Beyond Ghibli. Avec méthode (et néanmoins quelques douloureuses coupures), il a rassemblé 100 chefs-d’œuvre de l’animation nippone, films et séries confondus, en ordre chronologique. Le bal s’ouvre avec Devilman (Toei Animation, 1972) et le si beau, si dérangeant, si incroyablement seventies La Belladone de la tristesse d’Eiichi Yamamoto (Mushi Production, 1973). Il se referme, 52 ans et toute une histoire plus tard, avec Uzumaki d’Hiroshi Nagahama, cuvée 2024.

Au 100 fiches de films et séries, s’ajoutent des focus, consacrés aux réalisateurs (et quelques réalisatrices), aux studios et aux genres. Côté réalisateurices, on plonge la tête la première dans l’œuvre de Satoshi Kon (Perfect Blue), Mamoru Hosoda (Miraï ma petite sœur) ou encore Naoko Yamada (Silent Voice), entre autres. Pour les studios, passage obligé chez Ghibli mais détour aussi chez Kyoto Animation. Côté genre, c’est la fête : battle shonen, mecha, magical girl, iyashikei, harem, hentai, isekai, sport… Vertige des listes d’un monde qui paraît une jungle mais obéit aux règles d’un jardin à la française.

Le guide ultime de l’anime : pour les nuls et les confirmés

Chaque œuvre, caractérisée par un petit pictogramme aux airs de hanko, est reliée à deux autres titres avec lesquels elle partage des points en commun d’ordre thématique, productif, stylistique, etc. C’est la cerise qui en appelle une autre et – hop ! – 100 cerises plus tard, le panier est vide. Ce savant maillage de rappels a un double avantage. D’un côté, il étoffe les connaissances des convertis qui peuvent glaner, ici et là, de nouvelles infos. De l’autre, il offre un fil d’Ariane aux paumés, aux grands débutants.

Un exemple ? Heidi, fille des Alpes, chef-d’œuvre d’Isao Takahata et gigantesque madeleine de Proust collective. Elle est reliée au Tombeau des Lucioles, par son réalisateur, mais aussi au Sommet des Dieux (2021) par sa thématique. Le Sommet des Dieux est relié à Haikyu!! pour sa métaphore de la montagne à gravir et à Lady Oscar pour son héritage français. Lady Oscar (on en revient toujours à elle, la boucle est bouclée) se relie à Miss Hokusai de par sa nature de fresque historique où l’équilibre traditionnel des genre est mis en cause…. Et ainsi de suite, à l’infini (ou presque).

Bref, un régal en 100 petites portions, à savourer sans modération (et sans regard réprobateur des parents, cette fois).

EDG