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Family Romance, LLC, de Werner Herzog
avec Ishii Yuichi, Mahiro Tanimoto
En salles le 19 Août – Japon – 1h29

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Quelque part à Tokyo… Sous les cerisiers en fleurs d’un rose enjôleur, une jeune fille de douze ans, Mahiro, a rendez-vous avec son passé, un père fantasmé qu’elle n’a plus revu depuis sa tendre enfance. Ce que Mahiro ne sait pas, c’est que son « père » est en réalité un acteur de la société Family Romance, engagé par sa mère.

Comme ni le titre, ni le nom du majeur cinéaste (allemand) ne l’annoncent, autant le faire tout de suite. Cette « Romance Familiale » est intégralement tournée en japonais, une langue que Werner Herzog ne maîtrise pas, mais dont il parvient à capter le ton juste. Magnifiquement filmée tantôt à hauteur d’humanité, tantôt la surplombant, Family Romance fait aussi oublier que cette œuvre est une fiction, empreinte d’une telle part de réalisme qu’on se retrouve instantanément troublés, délicieusement perdus comme ses protagonistes, entre ce qu’on aimerait croire vrai et ce qui ne l’est pas… Malgré la situation extrêmement nipponne qui nous est présentée, nos constructions et fantasmes viennent s’imbriquer à ceux des personnages. Il ne reste plus qu’à ouvrir son esprit, qu’à suivre les indices laissés par le réalisateur avec une délicatesse poétique. Les pistes sont d’autant brouillées que l’acteur principal, Yuichi Ishii, joue son propre rôle, inspiré de sa vie et d’un phénomène de plus en plus répandu au Japon : la location d’acteurs pour satisfaire les besoins affectifs variés de ceux qui le demandent !! Une pratique plutôt connue au Japon, dans son monde de solitudes urbaines.

L’aventure débute avec la jeune Mahiro qui rôde autour d’un homme charismatique qu’elle a tout de suite repéré sur le pont populeux, leur point de rendez-vous. Un manège que Yuichi, l’homme en question, finira par remarquer et qui le conduira à l’aborder. Voilà ce père qui doucement lui raconte sans tricher, sans faux-semblants, sa part de vérité, le pourquoi du comment il est sorti de sa vie, sans jamais l’oublier, avec sobriété et sensibilité. Il se projette dans la tête de sa fille, imagine ses ressentis, les réactions de ses amis, questionne… Mahiro, lumineuse, toute en retenue, essayant de ne pas sourciller, écoute puis boit sans broncher les paroles sobres de ce père prodigue qui lui parait déjà ne plus être un étranger. Il lui trouve des airs de ressemblance, la complimente, voit en elle ses qualités, les valorise, l’encourage. Elle se laisse troubler, il semble l’être tout autant. Tous deux s’apprivoisent. Progressivement elle laisse tomber la herse, s’installer une belle connivence, une belle espérance dont chacun, chacune, a besoin pour se faire une bonne vie.  C’est le premier rendez-vous d’une longue lignée qui feront du bien à Mahiro, l’aideront à s’épanouir, elle qui imagine parler à son vrai père. Mais qui est réellement Yuichi ? Le décor étant planté, laissons la magie du récit opérer. Il va s’émailler de scènes prises sur le vif, à la sauvette, tournées en « mode guérilla », ce qui confère au film une immense authenticité. Plein d’humour, il vient profondément questionner le mode de vie nippon à travers un parcours des plus iconoclastes. A. F.